Vous est-il déjà arrivé d’idéaliser un pays, de vous y émerveiller à chaque visite pendant de nombreuses années, de n’en voir que les avantages et puis un jour, de déchanter ? C’est ce qui m’est arrivé avec les États-Unis. Je vous explique.
Pendant mon adolescence, j’avais eu l’occasion d’aller visiter pendant plusieurs semaines la côte est, le Grand Ouest puis la Floride et la Louisiane. Avec mes yeux de touriste et quelques années en moins, tout m’avait plu au pays de l’Oncle Sam : la grandeur des villes et des parcs nationaux, leur beauté, l’abondance, la nourriture, les gens avec qui il est facile d’engager une conversation… Un parfum de rêve américain…
Mon intérêt pour le pays grandissant, j’y ai passé 3 mois pour travailler au Grand Canyon. Ce fut une expérience riche en rencontres et en découvertes. J’ai savouré chaque moment de cet été… sauf les 10 derniers jours. Le 11 septembre de cette année-là, j’ai appris que je ne pouvais pas confirmer mon vol de retour vers la France car ce que je voyais à la télé n’était pas un film mais la réalité. L’ambiance était pesante, tous les collègues américains connaissaient quelqu’un à New York mais n’arrivaient pas à avoir de nouvelle. On ne parlaient que de ça, le nationalisme ressortait à fond tout comme les drapeaux américains, partout. Pour la première fois, j’avais le mal du pays. J’avais envie de rentrer mais je ne savais même pas quand ce serait possible.
Pourtant, cela ne m’a pas découragé plus que ça puisque je suis repartie pour un an cette fois en tant que fille au pair. C’est là où j’ai déchanté, où j’ai enfin ouvert les yeux, vu ce qu’en tant que touriste je ne pouvais/voulais pas voir. Pourtant, tout se passait bien avec ma famille d’accueil qui était top. Je m’étais bien intégrée avec le voisinage, je m’étais faite des amis, je découvrais pleins de choses intéressantes, je vivais dans de très bonnes conditions…
MAIS plusieurs faits m’ont marquée :
– Au centre équestre où j’étais bénévole, il y avait un employé qui avait des lunettes aux verres très épais. Il m’expliquait qu’elles n’étaient même plus adaptées à sa vue mais il n’avait pas les moyens d’en avoir d’autres. La monitrice souffrait d’une dent mais elle retardait le moment d’aller voir le dentiste car elle savait que les frais allaient être énormes. La plupart des américains ne peuvent pas se permettre de payer une mutuelle pour les frais dentaires. Moi-même, j’ai eu cet hiver-là une carie. Cela m’aurait couté moins cher de faire l’aller retour en avion pour me faire soigner en France. Mais le but était que je passe un an à l’étranger donc j’ai payé plus de 1000 $ pour avoir droit à un bout de coton dans ma dent que j’ai gardé pendant 6 mois. A mon retour en France, mon dentiste a été horrifié ! Ces faits m’ont fait réfléchir sur l’accès aux soins et sur la chance qu’on a en France d’avoir droit à la Sécu.
– Ma voisine, divorcée, garde des enfants pour gagner sa vie. Son ex-mari continue à payer la maison pour qu’elle puisse continuer à y vivre avec ses 2 enfants dans ce beau quartier. Elle veut passer un diplôme d’esthéticienne. Cela fait plusieurs années qu’elle a commencé les études. Mais elle n’a les moyens de se payer les cours que pour une matière par an… Alors, ça prend beaucoup de temps. Dans la famille d’accueil où je vis, les parents, alors qu’ils gagnent très bien leur vie, ont ouvert un compte en banque à la naissance de leurs jumeaux pour y placer de l’argent pour leurs études. Les études aux États-Unis coûtent extrêmement cher. La plupart s’endettent pour pouvoir y accéder.
– Un de mes voisins d’origine latino a accueilli un père et sa fille pendant quelques semaines pour qu’elle se fasse opérer gratuitement du cœur par un hôpital de Long Island (dans le cadre d’un programme annuel au profit des pays défavorisés). Ils venaient, je crois, du Honduras. La petite fille a pu se reposer tranquillement après l’opération. Jusqu’ici tout est beau. L’opération a bien marché, pas de soucis de ce côté-là. J’ai discuté avec le père en utilisant mes quelques mots d’espagnol. Il était très reconnaissant de l’accueil qui lui était fait.
Pourtant, chez lui, il dormait sur une paillasse et son seul bien était un bol. Il ne comprenait pas pourquoi certains américains avaient peur qu’il reste ici. Il n’en avait aucune envie. Cet homme était heureux avec ce qu’il avait. Il aurait souhaité que ces américains comprennent que ceux qui viennent de pays pauvres pour travailler ne viennent que pour l’argent, laissant leurs proches derrière eux. Ces immigrants n’ont souvent pas envie de s’installer aux États-Unis. Ils veulent juste ramener de l’argent à leur famille.
Après cette discussion, nous avons été invités à la fête d’anniversaire d’une voisine. La scène avait lieu dans une villa luxueuse avec piscine et toilettes dorées. Elle appartient à un ancien joueur de la NBA. Il y avait des enfants gâtés qui couraient dans tous les sens. Vient le moment d’ouvrir les paquets. Il y avait une montagne de cadeaux. C’est indécent tellement il y en avait ! Malgré la quantité, la gamine dont c’est l’anniversaire trouva le moyen de bouder car elle avait compté et horreur : il y avait moins de cadeaux que l’année d’avant ! Déjà que j’ai trouvé ça odieux mais qu’a dû penser ce père habitué à une vie frugale ?
Pendant cette année aux États-Unis, j’ai rencontré toutes ces personnes qui vivaient une vie bien loin du rêve américain. Ce que j’ai appris, c’est que c’est un pays qui est bien quand on est riche, qu’on peut se payer des frais de santé, des études, une maison… Mais cela m’a coupé toute envie d’y vivre, puis encore moins quand il y a eu Bush et maintenant Trump au pouvoir !
Et vous, quel est votre ressenti par rapport aux États-Unis ? Le rêve américain vous tente-t-il ? Avez-vous déjà vécu une expérience similaire avec un autre pays ?
Crédits photos : Matthew Rogers, Mando Gomez et Earl
Dessin extrait de http://theoatmeal.com/comics/america
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